Depuis la loi Cressard du 4 juillet 1974, le Code du travail dispose en son article L. 7112-1 que "toute
convention par laquelle une entreprise de presse s'assure, moyennant
rémunération, le concours d'un journaliste professionnel est présumée
être un contrat de travail. Cette présomption subsiste quels que soient
le mode et le montant de la rémunération ainsi que la qualification
donnée à la convention par les parties" (Cf. cette autre publication sur ce sujet).
En faisant expressément référence au "mode de rémunération",
la loi vise principalement le "journaliste pigiste" c'est-à-dire celui
qui, compte tenu du caractère souvent irrégulier de sa collaboration,
aurait précisément le plus de mal à établir l'existence d'un lien de
subordination et donc d'un contrat de travail.
Toutefois cette présomption de salariat ne bénéfice qu'à celui qui peut prétendre au statut de "journaliste professionnel", tel que visé par l'article L.7112-1 du Code du travail.
Est journaliste professionnel, selon l'article L7111-3 du Code du travail,"toute
personne qui a pour activité principale, régulière et rétribuée,
l'exercice de sa profession dans une ou plusieurs entreprises de presse,
publications quotidiennes et périodiques ou agences de presse et qui en
tire le principal de ses ressources" (cf. cette autre publication sur ce sujet).
Ce texte, qui précise donc les conditions que doit
nécessairement remplir une personne pour prétendre au statut de
journaliste professionnel, ne fait aucune distinction selon le mode de
paiement de la rémunération. En particulier, il n'exclut pas de ce
statut professionnel les journalistes qui sont payés à la pige.
Il résulte de la combinaison de ces deux textes du Code du
travail qu'un journaliste payé à la pige, peut, s'il remplit l'ensemble
des critères prévus pour y prétendre, avoir le statut de journaliste
professionnel et, comme tel, être présumé salarié.
Ces règles doivent être régulièrement rappelées.
Dans un arrêt du 15 septembre 2010, la Cour d'appel de Paris avait retenu qu'une "journaliste pigiste" ne pouvait "dès lors" pas "revendiquer le statut de journaliste professionnel bénéficiant comme tel de la présomption légale de salariat".
Cet arrêt a été frappé d'un pourvoi.
Après avoir rappelé les termes des articles L711-3 et L.7112-1
du Code du travail, la Cour de cassation dans un arrêt du 17 octobre
2012 (qui fera l'objet d'une publication au bulletin de cette Cour)
juge, fort logiquement, que l'arrêt de la Cour d'appel qui "retient
qu'en sa qualité de journaliste pigiste, l'intéressée ne peut
revendiquer le statut de journaliste professionnel bénéficiant comme tel
de la présomption légale de salariat" a violé ces deux textes.
L'arrêt de la Cour d'appel de Paris est donc cassé et les droits
des journalistes professionnels payés à la pige, souvent malmenés, sont
ainsi clairement réaffirmés par la plus haute juridiction française.
Vianney FERAUD
Avocat au barreau de Paris
Bonjour
RépondreSupprimerJe suis rédactrice pigiste. Un client peut il demander l'exclusivité d'une pige pour usage à volonté sur son site, blog, news letter et autres réseaux sociaux? Si oui à quelles conditions. Merci Isabelle Perriquet sur perriquet.isabelle@gmail.com
Un client peut tout demander...
RépondreSupprimerSi la question est : est-ce qu'il a le doit de vous demander cette exclusivité ? La réponse est évidemment oui.
Les vraies questions selon moi seraient plutôt celles-là : est ce que je peux refuser de lui donner cette exclusivité ? Est ce qu'il doit me payer une somme complémentaire pour cette exclusivité ?
La loi HADOPI a prévu une cession automatique et à titre exclusif des droits d'exploitation des articles écrits par un journaliste à son employeur, société de presse. C'est donc la règle mais une convention contraire est possible.
Cette cession automatique dépasse le champ du simple support initial.
Cela dit, une telle exploitation, surtout si elle n'est pas limitée dans le temps, doit donner lieu à rémunération complémentaire. Un accord d'entreprise est censé régler ces questions.