Selon les dispositions de l'article L 7112-4 du Code du travail, la décision de la Commission arbitrale des journalistes "est obligatoire et ne peut être frappée d'appel".
Cette obligation de recourir à l'arbitrage pour faire fixer, dans
certains cas, le montant de l'indemnité de licenciement d'un
journaliste ou assimilé (cf. cette autre publication sur ce point) et
le fait que la sentence rendue par cette Commission ne puisse faire
l'objet d'un appel, font régulièrement l'objet de critiques.
À l'occasion d'un litige, un employeur avait décidé de saisir la
Cour d'appel de Paris d'une question prioritaire de constitutionnalité
(QPC) portant sur la procédure devant la Commission arbitrale des
journalistes.
La Cour d'appel de Paris, dans un arrêt du 27 janvier 2011, a
considéré que cette question était dépourvue de caractère sérieux et a,
en conséquence, dit n'y avoir lieu à la transmettre à la Cour de
cassation.
Saisie d'une demande identique, la Cour d'appel de Paris a, par
un arrêt du 16 juin 2011, confirmé dans des termes similaires, son refus
de transmettre la QPC à la Cour de cassation.
Pour ce faire, la Cour d'appel a d'abord relevé que la compétence
de la Commission arbitrale des journalistes était restreinte.
Selon elle, "il
résulte de l'ensemble des dispositions du code du travail relatives aux
journalistes professionnels que la compétence de la commission
d'arbitrage est limitée à la fixation de l'indemnité due au salarié
ayant plus de quinze ans d'ancienneté dans les cas de rupture envisagés
par les articles L 7112-3 et L 7112-5, tous les autres litiges entre les
journalistes et leurs employeurs relevant de la compétence de la
juridiction prud'homale".
Cette observation est étonnante puisque la Commission arbitrale
est certes compétente pour déterminer le montant de l'indemnité de
licenciement des journalistes ayant plus de 15 ans d'ancienneté mais
elle l'est également pour statuer sur le montant des indemnités des
journalistes licenciés pour faute grave ou répétée et ce quelques soient
leurs anciennetés. Dans ce cas, il lui appartient d'apprécier
l'existence même de la faute reprochées au journaliste et son incidence
sur le montant de l'indemnité.
La Cour d'appel observe également que "les
décisions rendues par la Commission d'arbitrage peuvent faire l'objet
d'un recours en annulation pour les causes énoncées à l'article 1484 du
Code de procédure civile" (devenu depuis l'article 1491 du même Code).
Il est vrai que, dans de rares hypothèses, un appel en nullité
est possible. Il s'agit principalement des cas où la Commission
arbitrale a statué en dehors de son champ de compétence.
La Cour d'appel de Paris, pour rejeter la demande de transmission
de la question prioritaire de constitutionnalité, estime encore que le
principe du double degré de juridiction (c'est-à-dire le droit de faire
appel) n'a pas valeur constitutionnelle.
Le Conseil constitutionnel a, de fait, déjà jugé que "le principe du double degré de juridiction n'a pas, en lui-même, valeur constitutionnelle" (décision n°2004-491)
Enfin, la Cour d'appel de Paris observe que l'employeur et le journaliste bénéficient "des
mêmes voies de recours contre, d'une part, la sentence arbitrale
statuant sur l'indemnité de licenciement, d'autre part, la décision
prud'homale qui tranche, le cas échéant, les autres contestations
opposant les mêmes parties". Ainsi, selon elle, "l'article L
7112-4 du code du travail ne crée pas, entre les parties, une inégalité
de traitement qui porterait atteinte aux droits de la défense".
Sur ce point, la Cour d'appel de Paris reprend en fait la
motivation suivie par la Cour de cassation dans un arrêt du 29 octobre
2002 (il ne s'agissait évidemment pas alors d'une question prioritaire
de constitutionnalité mais d'un pourvoi contre un arrêt qui avait rejeté
l'appel formé contre une sentence de la Commission arbitrale des
journalistes). Il était prétendu que le fait que les décisions de cette
Commission ne soient pas susceptibles d'appel était contraire aux
dispositions de l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde
des droits de l'homme sur le droit à un procès équitable.
La Cour de cassation avait rejeté ce pourvoi au motif que "l'employeur
et le journaliste bénéficient des mêmes voies de recours contre, d'une
part, la décision prud'homale et, d'autre part, la sentence arbitrale".
Les parties sont donc a égalité et la procédure est donc
équitable au sens de cet article 6-1 qui ne prévoit d'ailleurs pas un
droit à faire appel.
Reste une question non posée, celle du coût de la procédure
devant la Commission arbitrale (le salarié et l'employeur doivent verser
une contribution financière à la Commission arbitrale destinée aux
frais de son fonctionnement) alors que la saisine d'un Conseil de
prud'hommes est, pour l'instant, gratuite (un projet de loi prévoit
toutefois d'instaurer une taxe de 35 euros).
Mais, là encore, aucun texte à valeur constitutionnelle, ne
prévoit que le recours à la Justice doit être gratuit (*).
En l'état - mais pour combien de temps ? - (cf. cette autre publication sur ce sujet), la procédure spécifique prévue, par la loi, devant la Commission arbitrale des journalistes n'est pas remise en cause.
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