Par une décision du 14 mai 2012, le Conseil constitutionnel a
déclaré conformes à la Constitution les articles L.7112-3 et L.7112-4 du
Code du travail.
Le premier de ces textes organise un régime spécial
d'indemnisation de la rupture du contrat de travail pour les seuls
journalistes professionnels, en prévoyant que "si l'employeur est à
l'initiative de la rupture, le salarié a droit à une indemnité qui ne
peut être inférieure à la somme représentant un mois, par année ou
fraction d'année de collaboration, des derniers appointements. Le
maximum des mensualités est fixé à quinze".
Il était soutenu par des employeurs que cette disposition, en ce
qu'elle ne s'applique qu'aux journalistes professionnels, porte atteinte
au principe d'égalité des citoyens devant la loi.
Le Conseil constitutionnel n'est pas de cet avis et estime qu'il "était
loisible au législateur, sans méconnaître le principe d'égalité devant
la loi, d'instaurer un mode de détermination de l'indemnité de rupture
du contrat de travail applicable aux seuls journalistes à l'exclusion
des autres salariés".
Quant à l'article L.7112-4 du Code du travail qui rend
obligatoire la saisine de la Commission arbitrale des journalistes pour
évaluer l'indemnité de licenciement des journalistes salariés en cas de
licenciement après plus de 15 ans d'ancienneté ou en cas de faute grave,
il était soutenu par les auteurs de la question prioritaire de
constitutionnalité qu'il porte atteinte au principe d'égalité des
citoyens devant la justice et qu'en outre, en prévoyant que la décision
rendue par la Commission arbitrale des journalistes ne peut faire
l'objet d'aucun recours, il méconnaît le droit à un recours
juridictionnel effectif.
Là encore, le Conseil constitutionnel rejette ces arguments.
Il considère "qu'en
confiant l'évaluation de cette indemnité à cette juridiction
spécialisée composée majoritairement de personnes désignées par des
organisations professionnelles, le législateur a entendu prendre en
compte la spécificité de cette profession pour l'évaluation, lors de la
rupture du contrat de travail, des sommes dues aux journalistes les plus
anciens ou à qui il est reproché une faute grave ou des fautes répétées
; que, par suite, le grief tiré de l'atteinte à l'égalité devant la
justice doit être écarté".
S'agissant de l'impossibilité d'interjeter appel de la décision
rendue par la Commission arbitrale (l'article L. 7112-4 du code du
travail dispose en effet que la décision de la commission arbitrale ne
peut être frappée d'appel), le Conseil constitutionnel rappelle que le
principe du double degré de juridiction n'a pas, en lui-même, valeur
constitutionnelle.
En outre, reprenant sur ce point les arguments qui avaient
initialement conduit la Cour d'appel de Paris à considérer comme
insuffisamment sérieuse la question prioritaire de constitutionnalité (cf. cette publication sur ce point), le Conseil observe que la décision de la commission arbitrale peut "faire
l'objet, devant la cour d'appel, d'un recours en annulation formé,
selon les règles applicables en matière d'arbitrage et par lequel sont
appréciés notamment le respect des exigences d'ordre public, la
régularité de la procédure et le principe du contradictoire ; que
l'arrêt de la cour d'appel peut faire l'objet d'un pourvoi en
cassation".
Bref, les dispositions de l'article L. 7112-4 du code du travail ne méconnaissent, selon le Conseil constitutionnel "ni
le principe d'égalité devant la justice, ni le droit à un recours
juridictionnel effectif, ni aucun autre droit ou liberté que la
Constitution garantit".
A l'évidence, la légitimité de cette Commission (que le Conseil
constitutionnel qualifie expressément de "juridiction") sort renforcée
par la réponse qui a été donnée à la question prioritaire de
constitutionnalité.
Vianney FÉRAUD
Avocat au barreau de Paris
Avocat au barreau de Paris
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Très bien
RE: Très bien