15 nov. 2013

Sanctions de la non déclaration des heures supplémentaires ou complémentaires effectuées par un journaliste

Une rédactrice en chef adjointe est employée par une Société de presse par un contrat à durée indéterminée à temps partiel.

Elle saisit le Conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt.

Elle soutient notamment que si elle a été payée sur la base d'un temps partiel elle a, dans les faits, travaillé à temps plein.

Elle demande donc le paiement des heures complémentaires effectuées et non payées et soutient également que son employeur s'est rendu coupable du délit de travail dissimulé.

Le Conseil de prud'hommes déboute la journaliste de l'ensemble de ses demandes.

En appel, la Cour d'appel de Paris infirme le jugement de première instance.

Cette Cour constate tout d'abord que le contrat de travail à temps partiel ne contient aucune des mentions obligatoires prévues à l'article L3123-14 du Code du travail, c'est-à-dire :

  • la durée hebdomadaire ou mensuelle du travail convenue ;
  • la répartition de la durée du travail entre les jours ou les semaines;   les cas dans lesquels une modification éventuelle de cette répartition peut intervenir ;
  • les modalités selon lesquelles les horaires de travail seront communiqués au salarié ;
  • les limites dans lesquelles le salarié peut effectuer des heures complémentaires ;
Ce contrat est donc présumé à temps complet.

La Cour d'appel constate en outre que la preuve des heures complémentaires est rapportée par la salariée.

Celle-ci produit en effet son agenda et des courriels qui démontrent que, alors qu'elle ne devait pas travailler les mercredis elle a été, du fait de la charge de travail, contrainte de travailler à "n'importe quelle heure du jour et de la nuit, tout au long de la semaine, y compris le mercredi et certains week-ends".

Les éléments versés au débat démontrent donc, selon la Cour d'appel, que la société de presse a imposé à la journaliste de rester en permanence à sa disposition, "générant des heures complémentaires nettement supérieures à la durée légale et ce, sans respect du délai de prévenance et sans aucune majoration de salaire".

"En l'absence des mentions obligatoires visées ci-dessus (c'est-à-dire celles prévues par l'article L3123-14 du Code du travail) et compte tenu de l'accomplissement d'heures complémentaires au-delà des limites autorisées", la Cour d'appel requalifie le contrat de travail en un contrat à temps plein et condamne l'employeur à payer un important rappel de salaires à la journaliste.

Mais la Cour était également saisie d'une demande au titre du travail dissimulé.

L'article L8221-5 du Code du travail dispose que :

"Est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur :
(...)
de mentionner intentionnellement sur le bulletin de paye "un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli".
Lorsque la durée réelle du travail a été dissimulée et que le contrat de travail a été rompu (ce qui était le cas en l'espèce), l'article L8223-1 du Code du travail prévoit que le salarié a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.

La Cour d'appel, au visa de ces textes, condamne donc la société de presse à payer à la journaliste une indemnité équivalente à 6 mois de salaire "en réparation du préjudice subi par elle du fait de la dissimulation de son emploi" (c'est-à-dire indépendamment du paiement des heures complémentaires elles-mêmes).

Elle estime que l'intention frauduleuse de l'employeur est caractérisée par "l'absence des mentions correspondant au temps de travail réellement effectué".

La Société est également condamnée à payer à la salariée les indemnités de rupture de son contrat de travail.

Cet arrêt a été frappé d'un pourvoi en cassation.

La Société de presse, pour critiquer l'arrêt de la Cour d'appel, soutenait d'une part que la preuve du caractère intentionnel de la dissimulation d'emploi n'était pas rapportée et d'autre part que l'indemnité prévue à l'article L8223-1 du Code du travail (égale à 6 mois de salaire) ne pouvait pas se cumuler avec les indemnités de licenciement.

Dans un arrêt du 19 septembre 2013, la Cour de cassation estime que la décision de la Cour d'appel selon laquelle "l'intention frauduleuse de l'employeur était caractérisée par l'absence des mentions correspondant au temps de travail réellement effectué" n'est pas critiquable. La preuve du caractère intentionnel de l'infraction de travail dissimulé est donc admise de façon souple.

Sur le second point, depuis un revirement de jurisprudence en date du 6 février 2013, la Cour de cassation estime qu'au regard de la nature de sanction civile de l'indemnité prévue à l'article L8223-1 du Code du travail, cette indemnité forfaitaire peut effectivement se cumuler avec les indemnités de toute nature auxquelles le salarié a droit en cas de rupture de la relation de travail.

Le pourvoi est donc rejeté.

Si une telle décision n'est pas nouvelle, elle éclaire sur les risques encourus par un employeur qui ne déclare pas sur les bulletins de paye la totalité des heures de travail effectuées par un journaliste.

9 nov. 2013

Un écrit doit être remis au journaliste lors de son embauche

Selon l'article L1221-1 du Code du travail, le contrat de travail "peut être établi selon les formes que les parties contractantes décident d'adopter".

Employeur et salarié peuvent donc, par application de cette disposition, décider que leur contrat de travail sera oral.

De fait, la remise d'un contrat de travail écrit n'est, sauf exception, pas obligatoire en droit français (nonobstant une directive européenne du 14 octobre 1991 qui impose la remise d'un écrit dans le délai de deux mois après le début de la relation de travail) et un salarié peut donc valablement être embauché par un contrat de travail oral.

Certes l'écrit est utile pour, en cas de litige, démontrer l'accord des parties sur le salaire, la qualification professionnelle, les tâches confiées au salarié... mais ces éléments du contrat peuvent être prouvés autrement que par le contrat de travail écrit (par le bulletin de paye notamment).

L'absence d'écrit n'est toutefois pas sans conséquence. Lorsque le contrat de travail est oral il est présumé de façon irréfragable être à durée indéterminée (la preuve contraire ne peut pas être rapportée) et de façon réfragable être à temps plein (la preuve contraire peut être rapportée).

Cette possibilité d'embaucher un salarié par oral souffre toutefois d'exceptions notamment lorsque une convention collective prévoit qu'un contrat écrit doit être effectivement remis par l'employeur.

C'est le cas de la convention collective des journalistes qui prévoit en son article 20 que : "chaque collaborateur devra recevoir, au moment de son engagement, une lettre stipulant en particulier son emploi, sa qualification professionnelle, la convention collective applicable, le barème de référence, la date de sa prise de fonction, le montant de son salaire et le lieu d'exécution du contrat de travail".

Il est difficile d'être plus clair. L'employeur d'un journaliste professionnel doit lui remettre, lors de son embauche, un écrit (qui n'est pas forcément un contrat synallagmatique puisqu'il n'est pas nécessairement contresigné par le salarié).

Une journaliste payée à la pige avait été embauchée sans qu'aucun écrit ne lui soit remis.

A l'occasion d'un litige l'opposant à son employeur, elle se plaignait de la non remise d'un contrat de travail écrit et demandait réparation.

La Cour d'appel d'Aix-en-Provence, dans un arrêt du 15 décembre 2010, avait rejeté cette demande en estimant que la journaliste ne justifiait pas de la réalité des avantages dont elle "aurait été privée du fait de l'absence de remise d'un contrat de travail écrit".

Cette analyse est censurée par la Cour de cassation qui, dans un arrêt du 23 octobre 2013, estime, au visa de l'article 20 de la convention collective nationale des journalistes, que puisqu'il résultait de ses propres constatations que l'employeur n'avait pas remis à la pigiste de contrat de travail écrit, la Cour d'appel aurait dû retenir que cette journaliste avait nécessairement subi un préjudice.

Cette jurisprudence n'est pas nouvelle. Dans un arrêt du 27 mars 2001, la Cour de cassation avait déjà jugé que le défaut de remise au moment de l'embauche d'un contrat de travail écrit en méconnaissance d'une disposition conventionnelle causait nécessairement un préjudice au salarié (en l'espèce le contrat écrit avait été établi un an après l'embauche alors que la convention collective applicable prévoyait que l'embauchage définitif d'un salarié doit être confirmé soit par une lettre, soit par un contrat avec référence à la convention collective, portant notamment mention de l'emploi, des éléments du salaire et des indemnités).

Le montant des dommages-intérêts dû par l'employeur à la journaliste en raison de la non remise d'un écrit au moment de son embauche devra être évalué par la Cour d'appel de renvoi.

Ce préjudice sera manifestement plus élevé si un litige opposant le journaliste à son employeur porte sur les éléments qui auraient dû faire l'objet de l'écrit au moment de l'embauche : l'emploi, la qualification professionnelle, la convention collective applicable, le barème de référence, la date de sa prise de fonction, le montant du salaire ou encore le lieu d'exécution du contrat de travail.

En pratique un grand nombre de journalistes - notamment ceux payés à la pige de façon régulière - n'ont pas de contrat de travail écrit.

Ils peuvent donc, selon la Cour de cassation, prétendre de ce seul fait à la condamnation de leur employeur à leur verser des dommages-intérêts.

Est ce qu'un contrat en anglais est valable ?

  • Par G. Rarementsoif le 10/11/13

RE: Est ce qu'un contrat en anglais est valable ?

L'article L1221-3 du Code du travail dispose que "le contrat de travail établi par écrit est rédigé en français".

A défaut, "l'employeur ne peut se prévaloir à l'encontre du salarié auquel elles feraient grief des clauses d'un contrat de travail"

8 oct. 2013

L'indépendance éditoriale de la publication, une condition pour la reconnaissance du statut de journaliste professionnel

L'ancien article L761-2 du Code du travail disposait que "le journaliste professionnel est celui qui a pour occupation principale, régulière et rétribuée l'exercice de sa profession dans une ou plusieurs publications quotidiennes ou périodiques ou dans une ou plusieurs agences de presse et qui en tire le principal de ses ressources".

Les publications auxquelles il est fait référence par texte ne se limitent évidemment pas à celles qui sont imprimées, cette notion recouvre également les oeuvres audiovisuelles et celles diffusées par voie électronique.

Au visa de cet article L761-2, la Cour de cassation considérait que, pour prétendre au statut de journaliste professionnel, une personne devait travailler dans une (ou plusieurs) agence(s) de presse ou société(s) de presse.

"Les publications quotidiennes ou périodiques" ne pouvaient en effet, selon cette Cour, s'entendre que comme celles éditées par une société de presse, c'est-à-dire une société dont l'activité principale est la presse.

Par exemple, dans un arrêt du 10 octobre 2001, la Cour de cassation a jugé qu'une personne qui collaborait à un magazine édité par un syndicat professionnel ne pouvait relever du statut de journaliste professionnel "peu important qu'une carte de journaliste professionnel lui ait été remise ou qu'un numéro ait été attribué à la revue par la commission paritaire des publications et des agences de presse" dès lors que ce syndicat professionnel "n'était pas une entreprise de journaux ou périodiques".

Cette jurisprudence n'était pas celle du Conseil d'état qui considère qu'une personne peut se voir délivrer une carte de journaliste professionnel même si elle collabore à une entreprise qui n'est ni une agence de presse, ni une société de presse. Par exemple, dans un arrêt du 22 juin 2001, le Conseil d'état a jugé que la "reconnaissance de la qualité de journaliste professionnel n'est pas nécessairement subordonnée à la condition que l'activité soit exercée au sein d'une entreprise de presse".

En 2008, lors de la refonte du Code du travail, l'article L761-2 a été abrogé et la définition du journaliste professionnel est désormais donnée par l'article L7111-3.

Ce texte dispose que "toute personne qui a pour activité principale, régulière et rétribuée, l'exercice de sa profession dans une ou plusieurs entreprises de presse, publications quotidiennes et périodiques ou agences de presse et qui en tire le principal de ses ressources".

A donc été ajoutée une référence directe à "une ou plusieurs entreprises de presse", ce qui apparaît conforme à la jurisprudence de la Cour de cassation.

Mais cet article L.7111-3 a aussi maintenu la référence aux "publications quotidiennes et périodiques" de l'ancien article L761-2 du Code du travail.

Or on peut penser que si, en 2008, le législateur avait voulu réserver aux personnes collaborant aux sociétés de presse ou aux agences de presse la possibilité de prétendre au statut de journaliste professionnel, il n'aurait pas repris cette référence aux "publications quotidiennes et périodiques" que la Cour de cassation considérait alors comme ne pouvant en fait que viser celles éditées par les sociétés de presse.

On pouvait donc se demander s'il n'y avait pas désormais non plus 2 mais 3 cas dans lesquels une personne peut prétendre au statut de journaliste professionnel.

En d'autres termes, la question qui était posée à la suite de la réécriture du texte légal sur la définition du journaliste était : est-ce qu'une personne qui collabore à une publication quotidienne et périodique éditée par une entreprise qui n'est ni une agence de presse ni une société de presse peut néanmoins bénéficier du statut de journaliste professionnel ?

Dans un arrêt du 5 avril 2012, la Cour d'appel de Paris a répondu par l'affirmative en reconnaissant le statut de journaliste professionnel à un salarié, tout en relevant pourtant expressément que son employeur n'était "pas une entreprise de presse ni une agence de presse".

La Cour d'appel, dans cet arrêt, a constaté que le salarié contribuait à la réalisation d'une "revue périodique qui publie des articles relatifs aux films à paraître sur les écrans du distributeur". Elle a précisé qu'il importait peu "à cet égard que ces articles soient dans l'ensemble plutôt élogieux et qu'ils présentent une vocation publicitaire et commerciale".

Dans un arrêt du 25 septembre 2013, la Cour de cassation estime également que "dans le cas où l'employeur n'est pas une entreprise de presse ou une agence de presse, la qualité de journaliste professionnel peut être retenue".

On ne peut être plus clair.

Une condition à cette reconnaissance est toutefois posée par la Cour de cassation puisqu'elle précise que cette qualité de journaliste professionnel peut être reconnue si la personne exerce son activité "dans une publication de presse disposant d'une indépendance éditoriale" .

Il s'agit d'une condition (non définie au demeurant) qui n'est prévue par aucun texte. Elle est donc créée de toute pièce par la Cour de cassation.

Il appartiendra maintenant aux juges du fond de rechercher, au cas par cas, si la publication à laquelle collabore celui qui prétend au statut de journaliste dispose ou non de cette indépendance éditoriale. On peut penser que cette indépendance éditoriale s'analyse comme la possibilité pour une rédaction de travailler sans interférence du propriétaire de cette publication (les actionnaires de l'entreprise de presse par exemple) ou de tiers (annonceurs, groupes de pression...) dans le contenu des articles.

On sait que le journaliste a le droit de prétendre, dans l'exercice de sa profession, au maintien d'une certaine autonomie et indépendance et qu'à défaut il est en droit d'invoquer la clause de conscience (voir cette autre publication sur ce sujet). Celui qui, dès le début de sa collaboration à une publication, ne dispose pas de cette indépendance et de cette autonomie ne pourra que difficilement, par la suite, invoquer un "changement notable dans le caractère ou l'orientation du journal ou périodique si ce changement crée, pour le salarié, une situation de nature à porter atteinte à son honneur, à sa réputation ou, d'une manière générale, à ses intérêts moraux". Bref, en poussant ce rapprochement sans doute un peu trop loin, on peut estimer que si une personne ne peut pas, quoi qu'il arrive, invoquer la clause de conscience des journalistes c'est précisément parce qu'elle n'est pas journaliste (exception faîte des journalistes employés par des agences de presse qui eux ne bénéficient pas de la clause de cession ou de conscience) ...

En l'espèce, la Cour de cassation casse l'arrêt objet du pourvoi qui avait été rendu par la Cour d'appel de Paris le 16 février 2012.

La Cour d'appel, pour reconnaître le statut de journaliste professionnel au salarié, avait pourtant relevé que la revue à laquelle il collaborait "peut être classée dans la catégorie générale de la presse d'information", "que l'examen de la maquette de cette même revue ne permet pas de considérer qu'il ne s'agirait que d'un journal, vecteur médiatique du mouvement syndical qu'elle incarne, dans la mesure où y sont publiés des articles de fond sur l'art de la céramique - présentation des créations, informations générales -, publication non réservée aux seuls artisans professionnels puisque s'adressant à un large public par abonnement".

Constats insuffisants selon la Cour de cassation qui estime qu'"en se déterminant ainsi, sans qu'il résulte de ses constatations que la salariée exerçait son activité dans une publication de presse disposant d'une indépendance éditoriale, la cour d'appel a privé sa décision de base légale".

Cet arrêt de la Cour de cassation du 25 septembre 2013 est assurément une évolution en ce qu'il ouvre clairement aux salariés employés par des entreprises qui ne sont pas des sociétés de presse ou des agences de presse, la possibilité de prétendre au statut de journaliste professionnel pour l'application des règles du droit du travail propres à ce statut.

Dans un arrêt du 20 janvier 2016, la Cour de cassation a confirmé clairement cette jurisprudence en cassant un arrêt de la Cour d'appel de Paris qui avait reconnu le statut de journaliste professionnel à un salarié qui ne travaillait ni dans une entreprise de presse ni dans une agence de presse mais qui effectuait bien, selon elle, un travail de journaliste pour des publications éditées par son employeur (une société de communication audiovisuelle). La Cour de cassation a reproché à cette Cour d'appel de n'avoir pas recherché "si les publications auxquelles était affectée la salariée disposaient d'une indépendance éditoriale".

Si la jurisprudence de la Cour de cassation se rapproche ainsi de celle du Conseil d'état, l'harmonisation entre la jurisprudence administrative et judiciaire n'est pas parfaite car la condition "d'indépendance éditoriale" posée par la Cour de cassation n'est pas retenue par le Conseil d'état.

Il n'est donc pas certain que la règle fixée par la Cour de cassation dans cet arrêt du 25 septembre 2013 mette un terme à la situation difficilement compréhensible puisqu'une personne peut être titulaire d'une carte de journaliste professionnel car répondant, selon la juridiction administrative, aux conditions posées par l'article L7111-3 du Code du travail tout en se voyant refuser ce statut par les juridictions judiciaires du travail au motif qu'elle ne respecte pas les conditions posées par ce même article L7111-3 (cf. cette autre publication sur ce point).

21 sept. 2013

Clause de conscience des journalistes

La clause de conscience du journaliste est prévue à l'article L7112-5 3° du Code du travail.

Ce texte dispose que lorsque la rupture du contrat de travail intervient à l'initiative d'un journaliste professionnel en raison du "changement notable dans le caractère ou l'orientation du journal ou périodique si ce changement crée, pour le salarié, une situation de nature à porter atteinte à son honneur, à sa réputation ou, d'une manière générale, à ses intérêts moraux" alors cette rupture produit les mêmes effets qu'un licenciement.

L'employeur est donc tenu, dans ce cas, de verser au journaliste une indemnité d'un montant identique à celui prévu en cas licenciement et ce salarié peut prétendre - sous réserve d'une durée de cotisation suffisante- à l'indemnisation versée par pôle emploi.

Cette disposition singulière ne doit pas être confondue avec la clause de cession des journalistes prévue à l'article L7112-5 du Code du travail (cf. cette autre page sur la clause de cession).

Si les effets de ces deux "clauses" sont similaires, dans le cas d'une clause de conscience la cause de la rupture du contrat de travail n'est pas la cession du journal ou du périodique auquel collabore le journaliste mais bien le changement dans le caractère ou l'orientation de ce journal ou périodique et les conséquences d'un tel changement pour le salarié.

Ainsi, si la mise en oeuvre de la clause de cession est liée à un fait normalement objectif et vérifiable (une cession donc), celle de la clause de conscience repose sur des considérations beaucoup plus subjectives.

En pratique, il appartient au journaliste qui estime que les conditions pour invoquer la clause de conscience sont réunies de notifier à son employeur sa décision de rompre, pour ce motif, son contrat de travail.

Dans une telle hypothèse, la loi dispense le journaliste de respecter le moindre préavis (ce qui n'est pas le cas lors de la mise en oeuvre d'une clause de cession). La rupture du contrat de travail est donc immédiate.

A réception du courrier du journaliste, l'employeur a un choix à faire. Il peut soit admettre que le journaliste a valablement invoqué la clause de conscience et lui verser l'indemnité de licenciement (sur décision de la commission arbitrale des journalistes si l'ancienneté du salarié est supérieure à 15 ans), soit contester le bien fondé de cette rupture.

Dans ce dernier cas, le journaliste n'a d'autre alternative que de saisir un conseil de prud'hommes pour faire juger qu'il a valablement invoqué la clause de conscience et demander, par voie de conséquence, la condamnation de son employeur à lui verser l'indemnité de rupture.

On devine que, dans la plupart des cas, l'employeur ne reconnaîtra pas que le journaliste a valablement rompu son contrat de travail par le jeu de la clause de conscience. Le salarié devra donc s'en remettre à l'appréciation des juridictions du travail.

Celles-ci doivent vérifier que les deux conditions prévues par la loi sont réunies, c'est-à-dire :

- qu'un changement notable dans le caractère ou l'orientation du journal ou périodique s'est produit ;

- que ce changement a créé une situation de nature à porter atteinte à l'honneur du salarié, à sa réputation ou, d'une manière générale, à ses intérêts moraux ;

L'examen de la jurisprudence ne permet pas de cerner de façon très précise les cas dans lesquels le journaliste peut valablement invoquer la clause de conscience.

C'est en effet après un examen des faits de chaque espèce que les magistrats apprécient souverainement si la clause de conscience pouvait ou non être invoquée par le journaliste.

Un arrêt rendu la Cour d'appel de Versailles le 10 septembre 2013 apporte une bonne illustration de la méthode suivie par les juges.

Cette Cour devait examiner la demande d'une journaliste qui avait invoqué la clause de conscience.

Elle exposait que la gestion et l'édition d'un supplément régional auquel elle collaborait depuis de nombreuses années avaient été transférées à la régie publicitaire. Selon cette journaliste, c'est cette régie qui dictait désormais la ligne éditoriale alors qu'elle n'était pas une entreprise de presse, en lui donnant des instructions qu'elle estimait incompatibles avec sa profession de journaliste.

Quant à l'employeur, il soutenait que les conditions de la clause de conscience n'étaient pas réunies.

La Cour d'appel de Versailles rappelle tout d'abord qu'"il appartient au journaliste de rapporter la preuve du changement invoqué".

En l'espèce, elle relève qu'il est établi que l'édition du supplément régional auquel collaborait cette journaliste a été transférée à la régie publicitaire.

Si les éditions de ce supplément régional contenaient déjà, avant ce transfert, des pages de publicités et d'annonceurs locaux ils comportaient aussi des articles rédactionnels écrits notamment par la journaliste.

Or la Cour constate que ce supplément ne comprenait désormais plus que des publicités ou des publireportages, les articles rédactionnels ayant quasiment disparu.

Selon la Cour, "la disparition des articles rédactionnels au profit de seules pages de publicité et d'annonces locales a constitué un changement notable dans le caractère de ce journal", au sens de l'article L. L7112-5 3° du Code du travail.

Restait donc à vérifier si la deuxième condition pour invoquer valablement la clause de cession était remplie, c'est-à-dire si ce changement notable avait créé, pour la salariée, "une situation de nature à porter atteinte à son honneur, à sa réputation ou, d'une manière générale, à ses intérêts moraux".

La preuve était rapportée qu'il avait été demandé à la journaliste de réaliser un publireportage alors qu'il n'était pas avéré qu'une telle instruction lui avait été donnée avant le transfert de l'édition de ce supplément régional à la régie publicitaire.

Même si la Cour d'appel n'y fait pas expressément référence, le droit des journalistes de ne pas réaliser des publireportages est consacré par l'article 5 de la convention collective des journalistes, placée sous le titre "principes professionnels", qui précise que, sauf accord particulier, "un employeur ne peut exiger d'un journaliste professionnel un travail de publicité rédactionnelle" et encore que "le refus par un journaliste d'exécuter un travail de publicité ne peut être en aucun cas retenu comme faute professionnelle"

La Cour estime ici qu'il "était déontologiquement impossible" à cette journaliste de suivre les directives d'une régie publicitaire, "ce type d'instruction" (c'est-à-dire des demandes de réalisation de publireportages) étant "contraire aux intérêts moraux du journaliste notamment à son autonomie et à son indépendance".

Cet arrêt est ici intéressant en ce qu'il rappelle que la profession de journaliste revêt des particularités et que, bien que tenus à leurs employeurs par un lien de subordination, les journalistes peuvent invoquer le droit au respect de leurs intérêts moraux pour refuser d'accomplir certaines des tâches qui leur sont demandées, voire pour provoquer la rupture de leurs contrats de travail.

De fait, si la loi prévoit que la clause de conscience peut être mise en oeuvre lorsqu'il est porté atteinte aux intérêts moraux du journaliste, c'est bien parce que le journaliste a, dans l'exercice de sa profession, de tels intérêts moraux.

Ces intérêts moraux ne sont toutefois pas précisés par la loi.

Les magistrats de la Cour d'appel de Versailles jugent ici que, parmi ses intérêts moraux, figurent l'autonomie et l'indépendance du journaliste.

La Cour de cassation considère également depuis un arrêt du 12 février 1964 que les journalistes bénéficient d'une certaine indépendance. Elle retient par exemple que la notion de subordination (nécessaire pour établir l'existence d'un contrat de travail) ne se conçoit pas, pour les journalistes "avec la même rigueur que celle ordinairement admise dans la généralité des entreprises commerciales". L'autonomie dont peut jouir un journaliste dans l'exercice de sa collaboration ne constitue donc pas un obstacle déterminant à l'existence d'un contrat de travail.

La Cour d'appel de Versailles après avoir estimé qu'il a effectivement été porté atteinte aux intérêts moraux de la journaliste retient qu'elle a valablement invoqué la clause de conscience.

Elle en déduit que "le contrat de travail a donc été rompu aux torts de l'employeur".

Cette dernière précision était sans doute inutile, puisque la mise en oeuvre de la clause de conscience (comme de la clause de cession) ne suppose pas nécessairement qu'un "tort" de l'employeur soit établi pour que la rupture produise les mêmes effets que celui d'un licenciement.

Si la clause de conscience est incontestablement un mode original de rupture du contrat de travail son intérêt principal n'est, en pratique, pas de permettre la rupture du contrat.

Du fait de la subjectivité des conditions qui doivent être réunies et de l'aléa inhérent à toute procédure judiciaire, le journaliste sera forcément hésitant à faire jouer la clause de conscience et il se tournera généralement vers un autre mode de rupture de son contrat de travail (rupture conventionnelle, résiliation judiciaire, voire prise d'acte de la rupture du contrat de travail).

L'utilité de cet article L7112-5 3° du Code du travail tient donc surtout au fait qu'il indique que les journalistes ont des "intérêts moraux" inhérents à l'exercice de leur profession.

Vianney FÉRAUD
Avocat au barreau de Paris



23 juil. 2013

Résiliation judiciaire du contrat de travail du journaliste (plus) payé à la pige

Un salarié qui estime que son employeur commet des fautes d'une certaine gravité dans le cadre de l'exécution de son contrat de travail peut saisir une juridiction d'une demande de résiliation judiciaire de ce contrat.

Lorsqu'elle est prononcée, la résiliation judiciaire du contrat de travail produit les mêmes effets qu'un licenciement abusif et le salarié peut donc prétendre à une indemnité de licenciement, à une indemnité compensatrice de préavis et à des dommages-intérêts pour licenciement abusif.

En revanche, si cette résiliation judiciaire est refusée par le Conseil de prud'hommes (ou par la Cour d'appel), le contrat de travail se poursuit.

Bien évidemment, un journaliste - comme tout salarié - peut prétendre à une résiliation judiciaire de son contrat de travail lorsque son employeur commet, envers lui, des fautes.

Lorsqu'il est payé à la pige de façon régulière, le journaliste est considéré comme employé sous contrat à durée indéterminée et il peut donc également poursuivre la résiliation judiciaire de ce contrat (cf. cette page sur ce sujet).

Dans ce cas, plusieurs questions se posent auxquelles un récent arrêt de la Cour de cassation apporte des réponses.

Pendant une dizaine d'années, soit de 1993 à 2002, une journaliste avait été payée régulièrement à la pige par une Société de presse.

A l'initiative de cette Société de presse, le montant des piges avait baissé de façon importante au cours des 6 premiers mois de l'année 2003.

Ensuite plus aucune pige n'avait été versée à cette journaliste.

Celle-ci saisit le Conseil de prud'hommes.

Elle lui demande de prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail du fait des manquements de son employeur (baisse puis arrêt des piges et non paiement de primes d'ancienneté) et de le condamner à un rappel de salaires et de primes d'ancienneté depuis l'arrêt de la collaboration et ce jusqu'au jour de la décision prononçant la résiliation du contrat de travail.

Le Conseil de prud'hommes de Paris déboute la journaliste de l'ensemble de ses demandes.

Cette salariée interjette appel de cette décision.

Par un arrêt du 2 novembre 2011, la Cour d'appel de Paris infirme partiellement le jugement du Conseil de prud'hommes.

Elle estime qu'"en arrêtant après juin 2003 toute collaboration professionnelle avec (la journaliste) ainsi privée de rémunération, après avoir sensiblement diminué son niveau d'activité dès le mois de janvier de la même année, la SNC PRISMA PRESSE a modifié de manière unilatérale le contrat de travail en s'abstenant de l'exécuter aux conditions convenues, ce qui constitue de sa part un manquement fautif d'une gravité suffisante de nature à justifier que la résiliation dudit contrat soit prononcée par la Cour à ses torts exclusifs, laquelle doit produire dans ce cas les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse avec toutes conséquences indemnitaires de droit".

Bref, la résiliation du contrat de travail est prononcée aux torts de l'employeur.

La date de "prise d'effet" de cette résiliation est toutefois fixée par la Cour d'appel au 1er juillet 2003, date à laquelle plus aucune pige n'a été versée à la journaliste.

Cette journaliste payée à la pige est donc déboutée de la demande de rappel de salaires qu'elle formulait pour la période comprise entre le 1er janvier 2003 (date du début de la baisse des piges) jusqu'au jour de la décision de justice prononçant la rupture du contrat de travail.

L'employeur est en revanche condamné à payer une indemnité de licenciement, un préavis et des dommages-intérêts au journaliste.

Cependant, alors que la journaliste demandait que ces sommes soient calculées sur la moyenne des 24 derniers mois de piges précédant la baisse fautive, soit sur les piges versées en 2001 et 2002, la Cour d'appel de Paris ne fait pas droit à cette demande et prend en compte la moyenne mensuelle des 3 derniers mois travaillées en 2003, soit une période au cours de laquelle le montant des piges avait déjà baissé de façon importante. Il en résulte que les sommes allouées à la journaliste sont très faibles.

Cette journaliste forme un pourvoi en cassation.

Par un arrêt du 3 juillet 2013, l'arrêt de la Cour d'appel de Paris est cassé, les 3 moyens soutenus par le journaliste étant retenus.

- Sur la date de la rupture du contrat de travail :

La Cour de cassation rappelle sa jurisprudence (constante depuis au moins depuis 2007 et réaffirmée dans un arrêt du 24 avril 2013), selon laquelle "en cas de résiliation judiciaire du contrat de travail, la date d'effet de la résiliation ne peut être fixée qu'au jour de la décision qui la prononce, dès lors que le contrat n'a pas été rompu avant cette date".

Or, elle constate que "pour prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de la société avec effet au 1er juillet 2003, rejeter les demandes de Mme X... à titre de rappels de salaire et de prime conventionnelle d'ancienneté sur la période de décembre 2003 à septembre 2011 et limiter le montant de l'indemnité conventionnelle de licenciement, l'arrêt retient que la prise d'effet de la résiliation judiciaire du contrat de travail ne peut être fixée qu'à la date de la décision la prononçant si le salarié est toujours à la même époque au service de l'employeur, et que les parties s'accordent sur le fait d'un arrêt de leur collaboration à compter du 1er juillet 2003 ".

Elle en déduit logiquement "qu'en statuant ainsi, alors qu'il ne résultait pas de ses constatations que le contrat de travail avait été rompu antérieurement à la date à laquelle elle statuait, la cour d'appel a violé le texte susvisé".

Puisque la date de la résiliation judiciaire du contrat de travail ne peut être fixée qu'au jour où est rendue la décision qui prononce cette résiliation, le contrat de travail, sauf s'il a été rompu entre temps pour une autre cause (licenciement, démission, départ ou mise à la retraite, prise d'acte de la rupture du contrat de travail, clause de cession...), ne prend fin qu'au jour de cette décision de justice.

La Cour d'appel de renvoi devra donc prononcer la résiliation judiciaire non pas à la date de l'arrêt des piges (1er juillet 2003), mais à la date à laquelle la résiliation judiciaire a été prononcée par la Cour d'appel, soit le 2 novembre 2011.

La journaliste devrait donc pouvoir prétendre à un rappel de piges durant toute cette période (2003 à 2011).

Il n'est pas inintéressant d'observer que le Conseil de prud'hommes qui, en décembre 2009, avait débouté la journaliste de toutes ses demandes (et qui n'avait donc pas résilié le contrat de travail) a, bien malgré lui, prolongé la poursuite du contrat de travail pendant la durée de la procédure d'appel, soit pendant presque 2 ans.

- Sur le montant des indemnités de rupture :

La Cour de cassation constate encore que la Cour d'appel a "pour limiter le montant des indemnités de rupture et des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse" retenu que "pour la détermination du salaire brut mensuel de référence, dans la mesure où l'article L. 7112-3 du code du travail prend en compte les derniers appointements perçus par le journaliste professionnel, il convient de se référer à la période des trois derniers mois travaillés en 2003 et non à la période 2001-2002".

Cette analyse est censurée et la Cour de cassation rappelle que "les indemnités consécutives à la rupture du contrat de travail devaient être calculées sur la base de la rémunération que la salariée aurait dû percevoir et non sur celle de la rémunération qu'elle avait effectivement perçue du fait des manquements de l'employeur à ses obligations".

Il y a donc lieu, pour le calcul de l'indemnité de licenciement, l'indemnité compensatrice de préavis et les dommages-intérêts pour licenciement abusif de se référer aux salaires versés avant la baisse fautive, c'est-à-dire ici avant 2003.

Une telle décision n'est pas nouvelle (cf. cette autre page sur ce sujet). Elle vise à sanctionner la pratique qui consiste, pour un employeur, à imposer à un journaliste pigiste une diminution progressive de ses piges destinée précisément à réduire d'autant le montant des indemnités de rupture qui sont normalement calculées sur la moyenne des salaires effectivement reçus au cours des derniers mois.

Espérant une reprise du volume des piges à son niveau antérieur, le journaliste pigiste - parfois en situation de grande précarité - n'ose pas se plaindre de cette diminution et on ne pourrait évidemment qu'encourager cette pratique si, au moment de la rupture, l'on ne prenait en compte, comme l'avait fait la Cour d'appel de Paris, que les 3 derniers mois de salaires.

- Sur la base de calcul de l'indemnité de licenciement du journaliste payé à la pige :

Enfin, la Cour de cassation casse l'arrêt de la Cour d'appel du 2 novembre 2011 en ce qu'il a estimé que l'indemnité de licenciement de cette journaliste payée à la pige devait être calculée sur la moyenne des 3 derniers mois de travail, soit d'avril à juin 2003.

La cassation était certaine puisque la Convention collective des journalistes prévoit en son article 44 que cette indemnité est calculée, pour les journalistes ne percevant pas un salaire mensuel régulier, sur la base de 1/12ème des salaires perçus au cours des douze mois précédant le licenciement ou de 1/24ème des salaires perçus au cours des vingt-quatre derniers mois précédant le licenciement et ce au choix du salarié.

Dès lors que la journaliste - dont la rémunération à la pige n'était pas fixe - demandait à ce que soit prise en compte la moyenne des 24 derniers mois pour le calcul de l'indemnité de licenciement, la Cour d'appel ne pouvait valablement retenir celle des 3 derniers mois.

Cette règle de la moyenne des 12 ou 24 derniers mois vise d'ailleurs précisément à ne pas défavoriser le pigiste dont la rémunération aurait baissé au cours des derniers mois précédant la date du licenciement, ou comme dans le cas d'espèce, la date de la résiliation judiciaire du contrat de travail.


Vianney FÉRAUD

Avocat au barreau de Paris



commentaires

La disposition du salarié à l'entreprise devient secondaire

  • Par resiliation le 19/09/13
Il semble que cette jurisprudence vienne en echo d'une autre du mercredi 24 avril 2013 N° de pourvoi: 11-28629 .
Si un contrat de travail n'est pas rompu, il se poursuit et la notion de dispostion du salarié à l'entreprise passe au second plan et ne semble plus primordiale

RE: La disposition du salarié à l'entreprise devient secondaire

Certes. L'écho vient même de plus loin puisque depuis 2007, la cour de cassation juge qu' "en cas de résiliation judiciaire du contrat de travail, la date d'effet de la résiliation ne peut être fixée qu'au jour de la décision qui la prononce, dès lors que le contrat n'a pas été rompu avant cette date".


Le calcul de l'indemnité sur les 3 derniers mois

  • Par Bertrand le 08/01/14
Bonjour
Il s'avère donc que l'indemnité de licenciement d'un pigiste ne peut en aucun cas être calculée sur la base des trois derniers mois, contrairement à ce que vous envisagiez dans un article plus ancien ?
Merci

RE: Le calcul de l'indemnité sur les 3 derniers mois



Pas forcément.

La durée de la période de référence à retenir pour le calcul de l'indemnité de licenciement d'un journaliste payé à la pige est celle qui est la plus intéressante pour le salarié.

Si, dans son arrêt du 3 juillet 2013, la Cour de cassation casse l'arrêt d'appel c'est parce que les juges avaient rejeté la demande du pigiste tendant à prendre en compte les 24 dernier mois de travail précédant la baisse de sa rémunération.

La Cour d'appel avait retenu que "dans la mesure où l'article L.7112-3 du code du travail prend en compte les « derniers appointements » perçus par le journaliste professionnel, c'est à tort que Mme Marie-Christine L. revendique un mode de calcul sur la période 2001/2002 (1 498 euros mensuels en moyenne) de sorte que, comme le soutient à bon droit la SNC PRISMA PRESSE, il y a lieu de retenir la moyenne mensuelle sur les 3 derniers mois travaillés en 2003 à concurrence de la somme brute de 538,44 euros".

Cette décision est doublement censurée par la Cour de cassation :

- d'abord en ce qui concerne la période de référence : il convient de retenir la période qui a précédé la baisse fautive des piges ;

- ensuite sur la durée de cette période de référence : dès lors que le journaliste était payé à la pige, il était en droit de demander l'application des dispositions de l'article 44 de la convention collective des journalistes (c'est-à-dire demander à ce que son salaire de référence soit calculé sur une période de 12 ou 24 mois).

RE: Le calcul de l'indemnité sur les 3 derniers mois

  • Par Bertrand le 08/01/14
Pardon d'insister, je m'y perds un peu.
Peut-on, au vu de la jurisprudence, revendiquer une indemnité sur les trois derniers mois alors que la convention collective n'énonce ue deux propositions pour les pigistes : les douze ou les vingt-quatre derniers mois ?

RE: Le calcul de l'indemnité sur les 3 derniers mois

A ma connaissance, la jurisprudence ne s'est pas prononcée sur ce point précis.

A mon avis (mais cela reste "mon avis"...), le journaliste payé à la pige est en droit de demander l'application de l'article R1234-4 du Code du travail :

Le salaire à prendre en considération pour le calcul de l'indemnité de licenciement est, selon la formule la plus avantageuse pour le salarié :
1° Soit le douzième de la rémunération des douze derniers mois précédant le licenciement ;
2° Soit le tiers des trois derniers mois. Dans ce cas, toute prime ou gratification de caractère annuel ou exceptionnel, versée au salarié pendant cette période, n'est prise en compte que dans la limite d'un montant calculé à due proportion.``

et ce par préférence à ce que prévoit la convention collective des journalistes.